François Duport : « L’apprentissage du match à l’école de tennis va être progressif et adapté »

Aussi riche que novateur, le concept “l’École du match - Prends-toi au jeu” intègre l’apprentissage du match dès l’entrée à l’école de tennis via des situations de jeu, le comptage de points, des plateaux pédagogiques et des matchs homologués dès 7 ans. François Duport, en charge de la coordination du programme Enseignement et compétition à la DTN, esquisse l’esprit et l’objectif de ce concept. Échanges.

Quel est l’esprit de “l’École du match - Prends-toi au jeu” ?

Nous sommes d’abord partis de deux constats principaux : une étude sur l’organisation de la compétition dans nos territoires, et l’analyse du taux de compétiteurs chez les 8, 9, 10 ans qui stagne à 18,5% de licenciés qui jouent en compétition officielle en terrains orange et vert (en précisant qu’il s’agit d’une moyenne qui varie parfois fortement d’un endroit à un autre). Avec la Commission fédérale des jeunes, un groupe de cadres techniques et l’appui de la psychologue Mélanie Maillard, qui travaille au sein du pôle Dimension mentale et psychologique, nous avons donc réfléchi à comment intégrer cet apprentissage du match chez les enfants. Dans notre réflexion, nous avons aussi pris en compte les raisons de l’abandon de l’activité en fin d’année. Parmi les griefs, l’absence de compétition, de matchs dès la première séance comme il y en a naturellement dans les sports collectifs par exemple. Il faut donc que le match soit présent chaque semaine et vienne compléter des concepts pédagogiques que nous utilisons comme Tennis Cooleurs d’Olivier Letort, et celui de la Nouvelle école de tennis imaginée par Walter Gouy.

Comment résumer l’objectif poursuivi ?

Nous avons voulu intégrer le match dans notre pédagogie dès les débuts de l’enfant en club, pour qu’à 7-8 ans, il soit capable de connaître les règles, de compter les points, de maîtriser les changements de côté, le jeu décisif, de juger si une balle est bonne ou faute… Certains clubs ne le faisaient pas ou peu. Or quand on instaure des matchs, situations de jeu ou petits tournois dès la première séance, ces réticences sautent. Il faut apprendre à compter les points, à gagner, à perdre, à passer par différents sentiments, à se concentrer, se dépasser, etc. Certains apprenaient à maîtriser des coups mais pas le jeu. Or jouer est naturel chez l’enfant : très vite, dans une cour d’école, il invente différents jeux avec des règles, parfois complexes, avec parfois un comptage de points. Nos clubs, comités et ligues doivent aussi réfléchir à des calendriers de match cohérents.

Quels en sont concrètement les grands principes ?

Pour un enfant, l’apprentissage du match à l’école de tennis va être progressif et adapté. Il se fait dès la première séance – et à chaque séance – sur l’atelier jeu, match et tournoi, mais aussi lors de plateaux pédagogiques par niveau de jeu, sans officialisation des résultats, principalement sur les terrains violet et rouge, pour ensuite arriver aux matchs homologués (matchs libres organisés par l’enseignant à partir de la catégorie 7 ans et le niveau orange). Sans rentrer dans les détails, pour organiser cet apprentissage du match, les matchs officiels (et par la suite la compétition), l’enfant se voit attribuer par l’enseignant un niveau identifié par une couleur en fonction de ses compétences techniques, tactiques, comportementales et d’arbitrage (blanc, violet, rouge ou orange de 1 à 10 ans, pour passer d’une couleur à l’autre, il faut remporter 12 victoires sur un adversaire de sa couleur lors d’un plateau, ou si l’enseignant le décide sur ADOC, puis vert de 8 à 10 ans). Après ses premiers matchs officiels disputés, il peut obtenir un classement fédéral : à partir des catégories 7, 8, 9 et 10 ans, par des compétitions homologuées orange et verte (matchs libres, tournois ou rencontres par équipes) et après plusieurs victoires, l’enfant peut obtenir un classement fédéral. Ce classement ne constitue qu’un repère pour organiser la compétition : il évite des oppositions déséquilibrées avec un perdant écoeuré et un gagnant qui a le sentiment de perdre son temps face à un adversaire trop faible. Ce nouveau mode de classement a été validé, il est en conception informatique. Il permet juste de mieux situer les enfants, même si le fait d’être le mieux classé n’est pas une fin en soi.

Il s’agit aussi d’instaurer une nouvelle dynamique...

Oui, avec ce nouveau système, on mobilise tout le monde : les dirigeants et enseignants, car ces derniers forment par des jeux d’apprentissage, des matchs ou un tournoi à chaque séance, et organisent des temps de matchs non officiels (plateaux pédagogiques) ou officiels (matchs libres). On implique aussi les parents en communiquant avec eux sur l’évolution de l’enfant, le matériel à utiliser, dont la raquette, la programmation des matchs, leur rôle dans la formation afin qu’ils deviennent des partenaires de l’enseignant. Mélanie Maillard a par ailleurs préparé un document à destination des parents qui leur explique de quelle façon accompagner leurs enfants dans la compétition (comment communiquer avec l’enfant, se comporter, etc.). Encore une fois, un compétiteur reste plus longtemps licencié et s’orientera ensuite vers la compétition officielle, l’arbitrage, deviendra peut-être bénévole dans son club. Le temps de match constitue toujours un moment dynamique dans un club. Notre détection se faisait par ailleurs sur trop peu d’enfants, il fallait élargir cette base. Avec nos concepts pédagogiques formidables (Letort, Gouy), les matchs libres qui existent depuis longtemps, et désormais “l’École du match”, nous avons tous les outils pour réussir.

À qui ce nouveau classement s’adresse-t-il ?

En priorité aux enfants mais aussi aux adolescents ou aux adultes. On comprend tout à fait que certains ne veuillent pas aller vers la compétition mais on va désormais intégrer cet aspect à toutes nos séances, de façon très ludique et naturelle comme quand on compte les points entre amis lors d’une pratique sportive.